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4. A la ferme Loterie
Après avoir pédalé pendant environ 20 minutes, nous quittâmes la route pour entrer dans la cour d'une ferme(1). Un chien courut après nous et aboya. Alors que nous descendions de nos vélos, le fermier sortit de la maison. Le fermier et le jeune garçon parlèrent sur un ton animé et ils me pressèrent dans la grange. Je grimpai à l'échelle derrière eux, dans le grenier à foin. Nous nous assîmes tous les trois sur le plancher et soudain je me sentis fatigué.
J'essayai de remercier mes nouveaux amis. Mais ils étaient plus curieux de savoir comment notre avion avait été abattu. Par gestes, je pus leur restituer l'histoire. J'avais un paquet de cigarettes dans ma poche de chemise, que je leur passai. Une longue conversation s'engagea entre les deux français à propos des cigarettes américaines, tandis qu'ils tiraient dessus profondément. Peu après, dans l'après-midi, le fermier alla dans la maison. Quand il revint, il apporta une petite miche de pain brun, une bouteille de vin et des verres. J'arrosai le pain avec du vin. Au crépuscule, la bouteille était vide. Plus tard, mes amis descendirent l'échelle et je m'allongeai. Bientôt je m'endormis profondément sur le foin doux et parfumé.
Le jour se levait et le coq chantait quand je me réveillai. J'avais une couverture de l'armée U.S. sur moi. Le fermier apparut, apportant du jambon et de l'omelette dans une poêle en fer, et un bol de lait chaud. J'essayai de me lever et constatai que je n'y arrivais pas. En roulant sur mon ventre, je pus me relever, me mettre sur les genoux et enfin m'asseoir.
Lorsque j'eus fini de manger, il me montra les mots " U.S. Army " inscrits au fond de ma poêle. Il avait combattu avec les soldats américains pendant la première guerre mondiale.
Le fermier m'indiqua que des patrouilles allemandes étaient en train de me chercher dans la campagne. Il me conduisit dans un fourré de bruyères non loin de la grange. Je rampai dans le fourré et attendis que le jour passe. Vers 10 heures, un camion arriva dans la cour de la ferme et je pus entendre des voix. Le camion partit au bout de 15 minutes. Ce soir-là, j'appris que le camion était conduit par des soldats allemands. Le fermier n'avait pas vu d'Américains et les Allemands repartirent après une brève inspection.
Durant les deux jours qui suivirent, je passai la journée dans le fourré et je fus de retour dans la grange la nuit. Quelques français vinrent le soir voir l'Américain et discuter de ma situation. Ils marquaient fréquemment des pauses pour injurier les Allemands et se versaient plus de vin pour arroser la défaite allemande proche. Apparemment, les Français n'aimaient pas l'eau, ils n'en buvaient jamais tant qu'il y avait du vin. Leur vin était léger, avait bon goût et semblait abondant. Tard dans la seconde nuit, on décida que je devais partir le lendemain. Il était dangereux de rester trop longtemps à la même place.
(1) Ferme de Marcel Biret à Loterie (ou Lottrye) St-Philbert-de-Grand-Lieu
Lire le témoignage de Marcel Biret
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